Je n’arrive plus à écrire. Je n’arrive plus à rêver. Je n’arrive plus à rester concentré. Je zappe d’une info à une autre. Je suis nerveux. Je suis absent.Quand je mange, quand je dors, quand je travaille, quand je regarde la télé, quand je rends visite à ma famille, quand je passe du temps avec mes amis, quand Stéphanie me parle de sa rupture avec Thomas, il est là avec moi et moi je n’y suis plus tout à fait. Je suis absent. Tout le temps. Il a mon premier regard le matin, les yeux à peine ouverts. Il a mon dernier regard le soir avant de m’endormir.Je sais la place qu’il a prise et je me déteste de le laisser faire. Et j’ai beau tenter des trucs, de le maudire, de l’abandonner, de l’éteindre. Je lui reviens, toujours. Pour une dose, une toute petite dose de dopamine. » Je vis de petites doses de plaisir minable. Et j’ai honte mais j’arrive pas à faire autrement. «
Note d’intention du metteur en scène Jérôme Batteux:
Scroll part du constat flippant que mon smartphone a pris, dans ma vie, plus de place que j’aimerais lui en accorder. Qu’à un moment, je me suis fait complètement dépasser. J’ai perdu le contrôle.Petit à petit, j’ai remarqué l’influence qu’il a sur mon comportement, sur ma relation au monde, sur ma capacité à me concentrer, sur mes pensées, sur mon anxiété, aussi.De moi-même, j’ai commencé à dire que j’étais accrocs, de la même façon que j’ai pu l’être à la cigarette par le passé, avec les mêmes comportements idiots que j’observe, que je réprouve mais que je n’arrive pas à changer.L’OMS ne reconnait pas l’expression « addiction aux écrans » et pourtant, c’est bien cela que j’ai l’impression de vivre et je ne sais pas trop quoi en faire d’autant qu’autour de moi, je vois bien que tout le monde s’est plus ou moins fait happer. Scroll, c’est cette prise de conscience personnelle qui se déroule sous vos yeux. Une parole directe, sincère et brute de l’homme de théâtre que je suis devant vous qui faites le choix délibéré de couper vos smartphones pour venir assister à des spectacles. (D’ailleurs, êtes-vous êtes bien sûrs de les avoir coupés ?) Parce qu’un spectacle, c’est toujours ça de temps hors ligne de gagné. Une parole libre et décomplexée, dans la lignée de celle du spectacle DRAG mais avec, au plateau, la complicité de Flore Audebeau et de Frédéric Vern.
Flore et Frédéric sont tour à tour les protagonistes de mes flashbacks, un choeur de décharges de dopamine, mon smartphone, mes pensées, mon vide existentiel dans ce texte d’autofiction angoissée raconté à la première personne.Au-delà du constat et de la question de l’outil (puisqu’il n’y est pour rien), ce que j’interroge, c’est comment se comporte-t-on fasse au vide quand on cesse de le remplir ? Qu’advient-il quand nous sommes face à nous-même ?A la fin du spectacle DRAG, le personnage de la Patronne dit « on ne comble jamais les trous. On apprend juste à vivre avec. » Je m’y suis employé mais c’était manifestement plus facile à dire qu’à faire.Le texte s’ouvre sur les recommandations d’usage faites au public avant un spectacle puis, les choses s’emballent et c’est finalement autre chose que le spectacle qui a lieu.
Coproduction Cie des Petites Secousses, iddac, agence culturelle du Département de la Gironde et ville de Cenon
Les artistes seront libres de proposer en fin de résidence une ou plusieurs sorties publiques du travail effectué, à destination de professionnels ou tout public, information à venir ici même